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Née sous X, Maria-Pia a eu envie de connaître ses origines lorsqu’elle est elle-même devenue maman. Depuis qu’elle a fini par apprendre la vérité sur son histoire, elle ne décolère pas sur les circonstances de son « abandon » et elle réclame justice.
Un besoin de réponses
Petite, Maria-Pia a toujours su qu’elle avait été adoptée. « J’ai grandi dans une famille aimante qui ne m’a jamais rien caché. » Ses parents lui ont dit la vérité très tôt, avant même que leur fillette ne commence à poser des questions. Longtemps, Maria-Pia ne s’intéresse pas à la question. « J’ai d’abord occulté mon envie de connaître mes origines. Comme beaucoup d’enfants adoptés, je ressentais une sorte de ‘conflit de loyauté’. »
Néanmoins, la réalité et le besoin de connaître son histoire finissent par la rattraper. Le questionnement s’impose, comme souvent, lorsqu’elle devient mère à son tour. « Quand mon fils est né, j’ai commencé à avoir besoin de trouver des réponses. » Elle ose se lancer dans cette quête après le décès de ses deux parents adoptifs. « J’avais 40 ans et je suis tombée de haut. Quand je me suis rendue au Conseil
général, j’ai découvert que mon dossier était vide. J’ai espéré trouver plus d’éléments à la maternité où j’étais née, mais on m’a répondu que mon dossier aurait brûlé dans un incendie. »
« Comme beaucoup d’enfants adoptés, j’ai d’abord occulté mon envie de connaître mes origines »
Retrouvée par sa famille d’origine
Si Maria-Pia a finalement obtenu des réponses, c’est grâce à un heureux hasard. « Tout a basculé un soir de décembre 2010 quand j’ai retrouvé ma famille biologique. » Ce jour-là, elle reçoit un appel d’une certaine Donna qui recherche une sœur portant son nom. Non, Maria-Pia n’est pas la seule à se poser des questions ! « J’ai alors découvert l’existence de deux sœurs et de deux frères. Non seulement, j’avais une famille, mais elle était nombreuse ! » Sa mère, hélas, était décédée six mois plus tôt. « Mais elle n’a jamais cessé de penser à moi. Elle était italienne et, arrivée en France à l’âge de 17 ans, elle avait été mariée de force à son cousin. Elle était malheureuse et, après avoir eu ses deux premiers enfants, elle s’était enfuie brièvement avec un garçon qu’elle aimait bien. Mais, sans le savoir, elle était déjà enceinte de moi. »
En procès contre la maternité
Maria-Pia ne tolère pas d’avoir perdu plus de dix ans à cause du silence de l’administration. « Cette femme m’a recherchée toute sa vie. Elle
est morte en 2010. Et maintenant je sais qu’elle me cherchait elle aussi au moment où j’écrivais à l’hôpital ! » Ce rendez-vous manqué a poussé Maria-Pia à porter plainte contre la maternité. Et cette femme engagée milite aussi activement pour faire changer la loi.
« Actuellement, la France est le seul pays d’Europe, à l’exception du Luxembourg, à pratiquer l’accouchement sous X. Nous refusons cet anonymat, qui est une exception. Il faut que le lien entre la mère et l’enfant reste possible, pour qu’il ne soit pas obligatoirement rompu et que chacun puisse chercher l’autre et le retrouver plus tard. »
Selon elle, plusieurs raisons peuvent pousser une mère à abandonner son bébé et l’enfant a le droit de savoir d’où il vient. « J’ai participé à de nombreuses mises en relation et des médiations entre parents et enfants adoptés. Dans huit cas sur dix, les mères biologiques recherchées sont heureuses de renouer ce lien. » Pour mettre en lumière la souffrance de ces femmes, elle a aussi publié un livre*, nourri de témoignages recueillis. Maria-Pia s’alarme aussi du nombre de cas d’abandons forcés.
« Au départ, j’ai porté plainte contre la maternité où je suis née pour faux en écriture par personne ayant autorité publique, afin de dénoncer les mensonges des courriers de la maternité. » Mais la plainte sera ensuite élargie à la question des abandons forcés. « La police est en train de mener des auditions. Apparemment, de nombreuses femmes ont vécu la même chose que ma mère. Et beaucoup d’enfants ont été enlevés, comme moi, de force à leur mère… »
*Les Fantines, de Maria Pia Briffaut, disponible en appelant l’éditeur Le Lys Bleu
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