Chroniqueuse judiciaire des années durant au Parisien, Emmanuelle Maurel est décédée à l’âge de 58 ans. DR© DR.
Au soir, elle livrait un papier bien troussé — une de ses expressions. Elle n’était pas la plus rapide à rédiger, mais elle était de loin la meilleure et son compte rendu d’audience tombait pile à l’heure du dead line.
Son premier lecteur, le chef de service, se régalait. Il défilait dans la galerie des grandes affaires criminelles de la décennie 1990-2000 et voyait s’animer leurs acteurs. De Simone Weber, la bonne dame de Nancy convaincue d’empoisonnement, au zélé fonctionnaire de Vichy Maurice Papon. Et tant d’autres, comme ces frères siamois de l’horreur, les Jourdain, procès où elle était arrivée coûte que coûte au palais de justice de Saint-Omer, crottée de boue, après que sa voiture de reportage eut versé dans un fossé.
Elle rendait limpide un dossier d’instruction complexe
La chronique judiciaire est une spécialité journalistique, comme il y a le reportage, l’enquête ou l’interview, et ce genre peut tutoyer des sommets. Manu l’exerçait avec un art subjectif subtil, doublé d’une rigueur intellectuelle qui esquivait la passion de l’intime conviction autorisée aux seuls jurés. Elle n’en pensait pas moins et nous livrait au journal les récits haletants de ses transports aux Assises.
Ce service des faits divers qui était viscéralement le sien
Elle y avait débarqué pour un stage tout-terrain dans la jeunesse de ses 20 ans, licence de lettres en poche et diplômée de l’IPJ. Lorsqu’elle a, des années plus tard, déserté les tribunaux et pris des responsabilités, toujours aux Informations générales, ce service des faits divers qui était viscéralement le sien, elle éditait les papiers avec soin. C’est alors dans la titraille qu’elle a excellé, fulgurance arrachée dans l’adrénaline des bouclages.
La maladie et ses multiples désordres ont eu raison de ce talent auquel il faut rendre justice. À sa mère Madeleine, que nous savons toujours abonnée à notre journal et à son fils Alexandre, à ses amis de la presse judiciaire, les journalistes du Parisien associent leur chagrin. Dans nos archives dorment les articles d’Emmanuelle Maurel, ils attendent celles et ceux qui, un jour, s’intéresseront peut-être aux lointains dossiers criminels. À leur tour et à leur lecture, ils seront saisis, comme nous l’avons été.
Les obsèques auront lieu jeudi 2 mai à 14h30 au crématorium du Mont Valérien à Nanterre (Hauts-de-Seine).
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